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La générosité, une sphère de l’économie

La générosité est une sphère de l’économie, l’une des deux sphères, comme les deux sphères du cerveau humain. L’autre sphère, le marché, est plus connue. Les deux sphères sont connectées comme c’est le cas dans le cerveau. Cette connexion donne ouverture à la conscientisation et la plus-value. C’est pourquoi de nos jours nombre d’entreprises commerciales maintiennent d’étroites relations avec des organismes sans but lucratif.

La Loi sur l’impôt vise la sphère du marché, mais doit nécessairement prévoir un certain nombre de dispositions relatives à l’autre sphère, le don. Pendant de nombreuses années, la sphère du don était dans l’ombre de l’autre, comme l’autre face de la lune; on ne la voyait pas. Pourtant, le don est très ancien. Le don gouverne les familles, la bienfaisance, les artistes, les autochtones et, oui, les professions, y compris la profession d’avocat et d’avocate.

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, le don a connu une remontée spectaculaire grâce au  plan Marshall, un acte de générosité de la part du président Truman et de son secrétaire d’État, l’ancien commandant en chef George C. Marshall, envers l’Europe et qui se joint aux actes de générosité du général Douglas C. MacArthur envers l’Asie. La réciprocité est au cœur du don, donnant lieu à des attentes légitimes. La réciprocité est également au cœur du marché. Le don et le marché sont tous les deux des échanges.

À la suite de la réforme du Code civil du Québec en 1991, les dispositions concernant le marché, soit la vente, sont adjacentes aux dispositions concernant la générosité, soit le don : il s’agit des articles 1708 et suivants et les articles 1806 et suivants. On a fait du progrès! Mais il y a encore du progrès à faire avant qu’on puisse aligner davantage les deux sphères. Par exemple, dans la vraie vie, il s’agit de relations de coopération où on peut trouver des contrats à l’intérieur d’un protocole de partenariat public-privé.

Le lien est fait au Code civil par le principe de la bonne foi qui donne à la Cour le pouvoir d’aligner les deux sphères dans un cas particulier. Ce concept de bonne foi relève de la coopération pour contrer les effets des gestes déloyaux, y compris mais non limités à la fraude et autres formes de la corruption, au niveau de la distribution des gains et des pertes, c’est-à-dire la justice.

Cependant, la jurisprudence et la doctrine du monde juridique concernant le don et la connexité susdite ne sont pas trop développées pour l’instant. Il existe plusieurs grands experts en fiscalité en ce qui concerne les dons dans le contexte de lois fiscales, mais très peu d’experts en matière de dons. On a tendance à oublier que le donataire a une responsabilité lui aussi. Ce n’est pas tout de recevoir. Il faut donner en retour. C’est pourquoi le traducteur de l’œuvre de Robert Axelrod « The Evolution of Cooperation » a traduit le titre par « Donnant, donnant ».

Pour résoudre des différends en certains domaines, il faut être conscient de l’ensemble de l’économie. Par exemple, des fiscalistes organisent la succession dans une famille en relation avec une entreprise familiale sans tenir compte de la dynamique de la famille, ce qui est la source de nombreux différends familiaux futurs. Dans une affaire opposant des gouvernements aux autochtones par rapport aux programmes de bienfaisance, j’ai demandé aux parties au moment d’établir les faits quel était le fondement de ces programmes. Elles ont répondu sans hésitation de façon unanime : « la générosité ». Dès ce moment, on se trouvait sur la bonne piste. Les parties ont transformé leur différend en partenariat en conformité avec l’esprit du don.

Pendant mes études à la Faculté de Droit, il y avait une seule œuvre sur le don, le Traité de J. Émile Billette, qui faisait mention de l’œuvre magistrale de Marcel Mauss, « Essai sur le Don ». En supposant que les articles du Code civil sur la donation aient une relation avec le don, je cite les œuvres suivantes à titre de doctrine : Jacques T. Godbout, « L’esprit du don »; Alan D. Schrift, « The logic of the gift – Toward an Ethic of Generosity »; Lewis Hyde, « The Gift »; Dr. Constantine C. Menges, « The Marshall Plan From Those Who Made It Succeed »; Jack Weatherford, « Indian Givers »; et Darren Wershler-Henry « Free as in speech and beer – open source, peer-to-peer and the economics of the online revolution”.

Bonne lecture!

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