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Jugement récent – La Cour du Québec émet quelques commentaires instructifs sur l’obligation pour un franchisé de se renseigner et sur les contrats d’adhésion

Dans un jugement rendu le 21 mars dernier dans l’affaire Asselin c. Groupe pétrolier Olco ULC inc. (que vous pouvez lire en cliquant ici), l’honorable juge Pierre Coderre, de la Cour du Québec, a émis quelques commentaires fort instructifs sur l’obligation pour un nouveau franchisé de se renseigner, voire de consulter, avant de signer un contrat.

Les faits de cette affaire ne sont pas vraiment compliqués.

La demanderesse, Mme Nathalie Asselin, a signé avec Groupe pétrolier Olco des contrats pour exploiter une station-service et un dépanneur à St-Jean-Chrysostome.

Avant, et au moment, de signer ces contrats Mme Asselin n’a consulté, en aucun moment, quelque professionnel, que ce soit un comptable, un notaire ou un avocat, pour la conseiller.

Or, les contrats signés par Mme Asselin comportaient une clause stipulant que Groupe pétrolier Olco avait le droit, en tout temps, sur simple avis de 60 jours, y mettre fin s’il décidait « de cesser la commercialisation de ses produits pétroliers à l’endroit où sont situés les lieux loués ».

À peine plus de quatre mois plus tard, suite à une réflexion sur l’avenir de sa division de ventes au détail faite après l’échec d’un projet de vente de celle-ci, Groupe pétrolier Olco se prévalait de cette clause et avisait Mme Asselin de sa décision de résilier ses contrats 60 jours plus tard, soit le 3 décembre 2011.

Mme Asselin a alors intenté contre Groupe pétrolier Olco un recours en dommages d’un montant de 68 029,56$ pour fausses représentations et abus de droit.

Sans entrer dans le détail des faits de cette affaire, notons que le tribunal a conclu que Groupe pétrolier Olco avait bien renseigné Mme Asselin sur ses obligations et sur les principales clauses des contrats (dont celle stipulant le droit pour Groupe pétrolier Olco d’y mettre fin sur simple avis de 60 jours) et que, au moment de la signature de ces contrats, Groupe pétrolier Olco n’avait pas pris la décision de cesser la commercialisation de ses produits pétroliers à St-Jean-Chrysostome.

Le recours de Mme Asselin a donc été rejeté.

Dans son jugement, l’honorable juge Pierre Coderre a formulé les commentaires suivants concernant les recours d’un franchisé qui choisit de signer des contrats sans consulter un professionnel pour le conseiller et sans tenter de les négocier (ce qui était le cas dans cette affaire) :

    • Comme la Cour supérieure du Québec et la Cour d’appel du Québec l’ont toutes deux déjà énoncé dans l’affaire Distribution Stéréo Plus inc. c. 140 Gréber Holding inc., afin qu’un contrat puisse être considéré comme étant d’adhésion, il est nécessaire que le franchisé puisse faire la preuve qu’il a été empêché de le discuter librement et d’en négocier ses clauses, ce qui implique que le franchisé ait d’abord tenté de discuter et de négocier. Comme Mme Asselin n’a pas fait de telle tentative, ses contrats ont été jugés comme n’étant pas des « contrats d’adhésion »;
    • Bien que, face à une franchisée qui se lance en affaires pour la première fois, un franchiseur ait l’obligation de « l’informer de la teneur de ses obligations en vertu des contrats qu’elle va signer », la franchisée a tout autant « l’obligation de se renseigner ». À ce titre, la Cour du Québec s’en est notamment remise à l’extrait suivant du volume « Les obligations » des éminents auteurs juridiques Jean-Louis Beaudouin et Pierre-Gabriel Jobin :

« […] celui qui s’apprête à passer un contrat doit prendre les mesures raisonnables pour en bien comprendre les enjeux importants, les faits susceptibles d’influencer sa décision; l’obligation de se renseigner vient ainsi faire échec au devoir corrélatif de renseignement de l’autre partie […] »

En résumé, (a) pour qu’un contrat de franchise soit jugé « d’adhésion » (donc assujetti aux règles particulières prévues au Code civil du Québec pour ce type de contrat), le franchisé doit au moins tenter de le négocier (afin d’être par la suite en mesure de prouver, si tel est le cas, qu’il n’a pu ce faire), et (b) afin de pouvoir invoquer un manquement par son franchiseur à son devoir de renseignement, le franchisé doit lui-même aussi rencontrer sa propre obligation de s’informer, notamment en consultant des professionnels qualifiés pour le conseiller.

Je vous invite à me contacter (par courrier électronique à jhgagnon@jeanhgagnon.comou par téléphone au 514.931.2602) pour toute question ou tout commentaire.

Je tiens enfin à remercier Me Frédéric P. Gilbert, associé du cabinet Fasken Martineau, d’avoir porté cette intéressante décision à mon attention.

Jean

P.S.  – Invitation: Si les questions et les enjeux juridiques de la franchise vous intéressent, je vous invite à vous joindre au groupe « Droit de la franchise » sur le réseau LinkedIn. Pour accéder à la page d’accueil de ce groupe, vous n’avez qu’à cliquer ici.

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