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Résiliation pour inexécution contractuelle ou résiliation unilatérale?

Dans une décision récente, la Cour supérieure devait déterminer la validité de la résiliation d’un contrat de démarchage publicitaire intervenu entre une municipalité (la «Municipalité») et une entreprise spécialisée dans la location d’espaces promotionnels («PLC»).

Plus précisément, PLC réclame 137 782, 50$ pour la résiliation de son contrat avec la Municipalité. Cette somme représente le paiement des services rendus avant la résiliation, le gain manqué et une compensation pour troubles et inconvénients découlant de la résiliation fautive. De son côté, la Municipalité se porte demanderesse reconventionnelle et réclame des dommages pour le préjudice subi en raison du manquement de PLC à ses obligations contractuelles.

Tous les 3 ans, le contrat de démarchage publicitaire était consigné dans une entente écrite. L’entente datée du mois d’août 2011 confère exclusivement le droit à PLC de conclure des contrats de location avec des annonceurs pour des espaces publicitaires situés dans trois arénas de la Municipalité.

Or, peu de temps après sa conclusion, la Municipalité avise PLC qu’elle a eu vent du fait que cette dernière aurait fait défaut de respecter certaines de ses obligations. Ce faisant, elle enjoint PLC de suspendre ses activités afin d’effectuer certaines vérifications. En novembre 2011, la Municipalité adopte une résolution résiliant le contrat de démarchage publicitaire en raison du non-respect de l’entente par PLC.

En demande, PLC allègue que la Municipalité n’a pas respecté leur entente en ne lui donnant pas un avis de 30 jours lui permettant de remédier à la situation. De plus, PLC est d’avis que leur relation contractuelle correspond à un mandat, empêchant ainsi la Municipalité d’y mettre fin unilatéralement. Elle reproche à cette dernière d’avoir été de mauvaise foi et d’avoir commis un abus de droit.

Quant à la Municipalité, elle est plutôt d’avis que leur entente constitue à la fois un contrat de service et un mandat. Elle ajoute également que les parties n’ont jamais renoncé à ce que la Municipalité puisse mettre fin unilatéralement à leur relation. De plus, elle prétend que PLC a brisé le lien de confiance qui les unissait en manquant à ses obligations. Ainsi, elle soutient qu’elle a exercé son droit à la résiliation unilatérale et non son droit de résilier pour inexécution contractuelle.

Au terme de son analyse, la Cour estime qu’il s’agissait à la fois d’un contrat de service et d’un mandat. Néanmoins, elle est d’avis que la Municipalité n’a pas correctement exercé son droit à la résiliation.

D’entrée de jeu, la Cour précise que malgré l’emploi du terme «mandat», l’entente intervenue entre les parties constitue un contrat de service puisque PLC s’engage à fournir des services de démarchage en échange d’une rémunération. Accessoirement, il s’agit d’un mandat puisque le contrat comporte l’accomplissement de certains actes de nature juridique tel la signature de contrats publicitaires. Cette qualification a pour effet d’assujettir les parties aux règles applicables en matière de contrat de service en ce qui concerne le volet démarchage et à celles relevant du mandat pour le volet représentation.

En l’espèce, la Cour analyse l’exercice du droit à la résiliation en vertu des dispositions applicables aux contrats de service, étant d’avis que le litige concerne les obligations de PLC en tant que prestataire de services et non à titre de mandataire.

La Cour rejette les prétentions de la Municipalité en expliquant que l’énumération de cas de défaut donnant droit à la résiliation n’emporte pas une renonciation au droit de mettre fin unilatéralement au contrat. Cependant, la Municipalité a mis fin au contrat pour non-respect de l’entente, donc pour inexécution contractuelle. De plus, la Municipalité n’a pas agi comme si elle avait unilatéralement résilié l’entente. Premièrement, elle n’a pas payé l’indemnité de rupture prévue à l’article 2129 C.c.Q. Deuxièmement, elle s’est portée demanderesse reconventionnelle afin de réclamer des dommages pour troubles et inconvénients. La Cour est d’avis que ces agissements sont incompatibles avec la notion de résiliation unilatérale.

En s’interrogeant sur la validité de la résiliation de l’entente, la Cour rappelle que cette dernière prévoit qu’un avis de 30 jours est nécessaire. Or, aucun n’avis n’a été donné à PLC. La Cour se prononce comme suit à ce sujet:

[105]        La preuve démontre qu’aucun avis ou mise en demeure préalable détaillant les manquements reprochés n’a été transmis par la Ville à PLC, avant l’adoption de la résolution du Conseil de Ville, le 28 novembre 2011.

[106]        Il ne s’agit pas d’une situation où les manquements étaient tels, que PLC était en demeure de plein droit.

[107]        PLC n’a jamais été avisé, en temps opportun, de la teneur des manquements reprochés et il a ainsi été empêché d’y remédier. La résolution de la Ville qui lui a été transmise le 30 novembre 2011 est laconique et prévoit, comme seul motif de résiliation, le : « non-respect de l’entente ».

[108]        Le Tribunal est d’avis que la Ville n’a pas respecté les conditions préalables à l’exercice de son droit de résilier le Contrat pour cause puisqu’aucun avis préalable n’a été transmis à PLC. Au surplus, pour les motifs déjà exprimés, aucun des défauts invoqués par la Ville à l’encontre de PLC ne donnent pas ouverture à la résiliation du Contrat pour cause.

Ainsi, cette décision réitère l’importance pour les parties de respecter les conditions préalables à la résiliation pour inexécution contractuelle dans le cadre d’un contrat de service.

 

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