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Projet de loi 1: des cabanes à sucre au country club

Ça y est! Par le projet de loi 1, le gouvernement Marois jette à la poubelle ce qui était le tout nouveau RENA (registre des entreprises non admissibles), en vigueur depuis le 1er juin dernier seulement…

Comme ce registre ne contenait que des cabanes à sucre, ou presque, on n’y perd pas grand chose au bout du compte. Ses cinq mois d’existence prouvent que lorsqu’on apporte des modifications législatives, il faut plus qu’une volonté politique pour les faire appliquer.  Il faut surtout une véritable faisabilité, à la fois administrative et budgétaire. C’est probablement pour cette raison que le RENA n’a pas été en mesure de prendre sa place.

Le même type de problème pourrait bien guetter le projet de loi 1. Notons d’abord l’objectif très noble de ce dernier, qui vise à redonner la confiance au public en attestant l’intégrité des concurrents (article 2). On légifère donc sur l’intégrité en proposant des moyens pour la maximiser.

Or, l’exécution des dispositions contenues dans ce projet de loi est loin d’être simple. Tout d’abord, afin de choisir les entreprises éligibles à recevoir des contrats, il faudra mettre en place une équipe de fonctionnaires/inspecteurs/sélectionneurs au sein de l’AMF qui devront certifier plusieurs milliers d’entreprises, tout en pouvant exercer une discrétion administrative et sélectionner les plus intègres. Ce système risque d’être plutôt dispendieux et nous nous demandons s’il sera vraiment efficace en pratique. Le temps va nous en apprendre plus, mais il risque d’y avoir quelques difficultés d’application.

Par exemple, qu’en est-il des accords de libéralisation, en vertu desquels les (très nombreuses) entreprises étrangères, canadiennes comme américaines, peuvent soumissionner pour les contrats publics du Québec? Le projet de loi prévoit que l’AMF peut les certifier aussi, mais nos inspecteurs vont-ils vraiment être en mesure de vérifier l’intégrité et les bonnes mœurs de leurs actionnaires et dirigeants? Comment ces derniers vont-ils enquêter sur des entreprises de la Californie ou de l’Ohio?

D’autre part, nos plus petites entreprises, dont la très grande majorité n’a rien à se reprocher en matière d’intégrité, devront elles aussi s’adresser à l’AMF pour être certifiées, et ce, pour des contrats de 25 000$. Ces entreprises, qui doivent déjà verser des sommes à SEAO pour obtenir la documentation d’appel d’offres et sont submergées par les nombreuses démarches pour obtenir permis et attestations de toutes sortes, vont peut-être commencer à passer leur tour, ce qui est loin d’être bon pour les finances publiques puisque moins de soumissions risque de rimer avec prix plus élevés. Espérons que non…

C’est un grand risque d’augmenter ainsi les barrières à l’entrée avant même que notre soap opera préféré (lire la Commission Charbonneau) soit terminé. La pire chose qui pourrait arriver au Québec soit qu’on crée un Country Club où seuls quelques heureux élus pourront jouer, à cause des frais d’adhésion trop élevés…

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