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La médiation et la C.R.A.: pas toujours confidentielles!

Ce qui se passe, ou se dit, dans le cadre d’une médiation ou d’une conférence de règlement à l’amiable («C.R.A.«) est-il vraiment toujours confidentiel?

Deux jugements récents de la Cour d’appel du Québec nous montrent que la réponse à cette question n’est pas aussi évidente qu’elle ne le semble à première vue.

Dans le premier de ces jugements rendu le 17 juillet 2012 dans l’affaire Bombardier inc. c. Union Carbide Canada inc. (2012 QCCA 1300), la Cour d’appel a renversé une décision de la Cour supérieure qui avait accueilli une requête en radiation d’allégations.

Les allégations visées par cette décision, qui se trouvaient dans une requête en homologation d’une transaction conclue au terme d’une médiation, décrivaient ce qui, selon les requérantes, s’était déroulé pendant la médiation dans le but de définir l’objet de la transaction sur lequel les parties ne s’entendaient plus.

En effet, selon les intimées, la transaction conclue comportait une quittance complète, de la part des requérantes, pour l’ensemble des réclamations entre les parties alors que, selon les requérantes, cette quittance ne devait comprendre que celles de ces réclamations qui avaient été soumises au processus de médiation.

L’entente de médiation stipulait une clause de confidentialité rédigée en termes très généraux («Nothing which transpires in the Mediation will be alleged, referred to or sought to be put into evidence in any proceeding«).

Malgré le libellé de cette clause, qui ne prévoit aucune exception à la confidentialité, la Cour d’appel a conclu, après analyse de la doctrine et de la jurisprudence sur le privilège de confidentialité rattaché à des discussions visant le règlement d’un litige, que cette confidentialité n’était pas absolue et qu’elle perdait beaucoup de sa raison d’être dès qu’une transaction était conclue.

Selon la Cour d’appel «L’une ou l’autre des parties peut donc faire la preuve des communications échangées à l’occasion d’une médiation pour prouver l’existence ou non d’une transaction ainsi que son étendue, le cas échéant. En cas d’échec de cette démonstration, ces communications ne seront pas admissibles en preuve à d’autres fins

Plus récemment encore, la même question s’est de nouveau posée le 14 septembre dernier à la Cour d’appel dans l’affaire Presse Café inc. c. 9156-3817 Québec inc. (2012 QCCA 1650).

Cette fois, cela concernait non pas une médiation mais une C. R. A.

Contrairement à ce qui s’était passé dans l’affaire Bombardier inc. c. Union Carbide Canada inc., la Cour supérieure a dans ce dossier rejeté la requête en radiation des allégations de la requête en homologation d’une transaction.

La Cour d’appel a cette fois refusé aux requérantes la permission d’en appeler de ce jugement et, par conséquent, décidé de ne pas trancher immédiatement la question de la confidentialité de ce qui s’était dit pendant la C. R. A. puisque, selon la Cour d’appel, «le jugement (rejetant la requête en radiation d’allégations) ne crée pas une situation à laquelle le jugement final ne pourra remédier.» Dans cette affaire, la Cour d’appel a assimilé un jugement rejetant une requête en radiation d’allégations à un jugement qui rejette une objection à la preuve, lequel ne peut de façon générale faire l’objet d’une permission d’appel.

Ces deux affaires soulèvent une question importante qu’autant le législateur (lors de la rédaction de l’article 151.21 du Code de procédure civile) que la plupart des médiateurs (dans la rédaction de leurs ententes de médiation) n’avaient possiblement pas prévue: N’y a-t-il pas lieu de prévoir une exception à la confidentialité lorsqu’il s’agit d’interpréter le contenu ou la portée d’une transaction conclue au terme d’une médiation ou d’une C. R. A.?

Aussi, n’y aurait-il pas aussi lieu de prévoir une autre exception en cas de recours en annulation d’une telle transaction (pour permettre, par exemple, la preuve du dol de l’une des parties)?

Il s’agit là de questions qui méritent que l’on y réfléchisse sérieusement afin d’éviter la multiplication de débats post-médiation ou post C. R. A.

La médiation, tout autant que la C. R. A., ont pour but de permettre aux parties de régler leurs différends autrement que par la voie de procédures judiciaires, et non de les multiplier.

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