HomeBlogueInnovations juridiquesActualités juridiquesAmiante dans les immeubles du Québec : vers une plus grande transparence ? Partie II

Amiante dans les immeubles du Québec : vers une plus grande transparence ? Partie II

Cette semaine, je vous propose une partie II de mon billet du 9 mars 2012. Le sujet de l’amiante a ceci de particulier qu’il recoupe plusieurs de mes sujets de prédilection, en apparence disparates : d’abord l’actualité en droit immobilier, mais aussi la gouvernance des institutions et des entreprises québécoises et montréalaises, la santé environnementale, le milieu de l’éducation, la protection des enfants et de leurs droits fondamentaux et…l’Inde.

Le vent semble tourner pour l’amiante au Québec, depuis que le gouvernement fédéral a finalement accepté, en septembre dernier, de ne plus s’opposer à l’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste des produits chimiques dangereux de la Convention de Rotterdam et que Québec a retiré son aide à la mine Jeffrey, changeant de cap par rapport à la promotion du chrysotile au Québec et à l’international, notamment en Inde.

Dans cette foulée, j’ai appris cette semaine, grâce à Charles Côté, journaliste à La Presse, (et à cet article), et ici, qu’un nouveau règlement sur l’amiante devrait être adopté au printemps prochain par le gouvernement du Québec. Ce règlement, bien que présenté par la CSST, tiendrait compte de certaines positions prônées par le Conseil du patronat du Québec. En bref, ce règlement exigerait que les employeurs mettent sur pied et rendent accessibles aux travailleurs des registres localisant certains types de matériaux contenant de l’amiante, et ce, dans les deux ans suivant l’adoption du règlement.

En effet, comme on peut le lire ici, la logique veut que :

« Pour être en mesure d’appliquer la méthode de travail appropriée, il faut avoir un inventaire des endroits et des composantes qui contiennent de l’amiante et un plan d’intervention. »

Même si ce projet de règlement semble être le fruit d’un certain compromis entre la CSST et le CPQ, il s’agit là d’un premier pas important, et même crucial, vers une meilleure protection des travailleurs (les premiers visés étant les travailleurs de la construction et de l’entretien). De plus, en adoptant un tel registre, le gouvernement adopterait une position plus cohérente avec les positions de l’Institut national de santé publique du Québec, dont fait foi cet énoncé, tiré du site web de l’INSPQ :

« À propos de l’utilisation sécuritaire de l’amiante au Québec

La norme d’exposition à l’amiante chrysotile (1 fibre/ml) actuellement en vigueur au Québec (ref) est 100 fois plus élevée que celle qui prévaut aux Pays-Bas et en Suisse (ref) et elle est dix fois supérieure aux normes de beaucoup de pays occidentaux et d’autres provinces canadiennes (ref). De plus, dans l’état actuel des connaissances, il n’existe pas de seuil protégeant du cancer les personnes exposées à l’amiante (ref). Les études menées au Québec dans les usines de produits en amiante et dans la construction montrent que les lois et réglementations actuellement en vigueur ne sont pas toujours appliqués, conduisant ainsi au constat que l’amiante n’est pas utilisé de façon sécuritaire dans ces secteurs. »

Donc, le projet de règlement envisagé serait un premier pas, en attendant une meilleure protection du public en général (avec priorité pour les écoles et les autres bâtiments fréquentés par les enfants), éventuellement par l’établissement de registres centraux, comme il en est question ici, ici et ici, et comme il y en a en Australie, ou des normes plus strictes, incluant déclaration obligatoire aux locataires, comme en Ontario.

Bref, même si notre longue histoire de production et d’exportation d’amiante semble tirer à sa fin, ce projet de règlement me porte à croire que les tribunaux pourraient devenir plus enclins à considérer que la présence d’amiante constitue un vice caché, contrairement à un certain courant de jurisprudence (que j’ai évoqué dans le billet du 9 mars dernier mentionné ci-haut), selon lequel la présence d’amiante ne constitue pas un vice caché — chaque cas étant un cas d’espèce, cependant. Le travail des inspecteurs pré-achat pourrait également être appelé à devenir plus formel, avec la tenue de registres réglementaires.

De plus, il y a fort à parier que les experts en amiante (tant au niveau médical qu’au niveau juridique ou dans les domaines de l’inspection d’immeubles et de la construction) seront de plus en plus en demande au cours des prochaines années, au fur et à mesure que nous tournerons collectivement le dos à cette industrie, resserrerons les normes et les mesures de contrôle, et que nous ferons face, comme société, aux retombées à long terme des vestiges de cette industrie sur les infrastructures, l’environnement, l’économie et la santé publique.

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